COMMUNIQUÉ DE PRESSE
ABANDONNER AU PRÉFET LE SUIVI DES SOINS SANS CONSENTEMENT :
IGNORANCE DÉRAISONNABLE OU RETOUR EN ARRIÈRE ?
C’est avec une immense stupéfaction que nous avons appris ces propositions par la Presse.
En effet, dans le cadre du programme « action publique 2022 » un groupe de travail a passé en revue les missions des ARS pour formuler, dès Septembre prochain, des propositions de réforme applicables en 2019.
Pour les Soins Sans Consentement il est proposé que « l’ensemble de ces procédures relève de la sécurité publique et non de la Santé » !… en appelant à privilégier « les liens directs entre Établissements et Préfectures » !… Et, cerise sur le gâteau, les modèles d’arrêtés encadrant les décisions de soins sans consentement devraient être établis par le Ministère de l’Intérieur seul, qui les diffuserait auprès des Préfectures et Établissements de santé concernés !
Le gouvernement de N. Sarkozy l’a déjà envisagé : En effet, ces propositions ressemblent étrangement à la première version de la Loi de 2011 sur les soins sans consentement en Psychiatrie qui a été amendée par le Conseil Constitutionnel, et qui a introduit le contrôle judiciaire par le Juge des Libertés et de la Détention. Déjà en Mars 2013 les représentants de l’association du corps préfectoral avaient affirmé l’attachement des Préfets à leurs prérogatives en matière de soins sans consentement ; cette position n’a pas été retenue dans la Loi 2013 qui, rappelons-le, a été votée à la quasi-unanimité par l’Assemblée Nationale.
La démarche actuelle vise, sous prétexte d’une définition de missions des ARS et des Préfectures « plus rationnelle et plus directe », à reléguer la Psychiatrie à la défense sociale, et l’éloigne encore plus de ces fondamentaux qui sont d’abord et avant tout de soigner, comme toute discipline médicale.
Ces propositions, qui semblent vouloir tout ignorer de l’Histoire et de l’avenir, ignorent aussi que les patients psychiatriques sont fortement stigmatisés et que cette stigmatisation impacte leur prise en charge au quotidien et leurs possibilités de réinsertion.
Cette démarche, qui réduit les patients les plus vulnérables et les plus fragiles au seul risque de violence, semble aussi ignorer leur souffrance psychique.
La coupe est pleine !
A côté du malaise qui s’installe dans nos hôpitaux, à côté de l’absence de dialogue ces propositions, qui illustrent une montée sécuritaire rampante, risquent de déconstruire tous les acquis de notre discipline.
Elles renforceront davantage la confusion entre maladie mentale et dangerosité, vieille depuis 1838 !
Une ligne rouge est franchie !
Si ces propositions étaient retenues, la France serait une exception unique au sein de l’Europe !
Elle serait le seul pays européen à placer sous l’autorité du Ministère de l’Intérieur les soins sans consentement en Psychiatrie !
Le SPEP exprime sa plus grande indignation au sujet de ces propositions et il fera tout, en s’associant avec l’ensemble des organisations professionnelles et les représentants des familles et des usagers de la Psychiatrie, pour que ces orientations rétrogrades ne voient pas le jour.
Il demande solennellement à la Ministre de la Santé de supprimer définitivement ces conclusions de toute orientation de la Psychiatrie, de la Santé Mentale et de la Stratégie Nationale de Santé à venir.
Docteur Michel TRIANTAFYLLOU
Président du Syndicat des Psychiatres d’Exercice Public (SPEP)